L’obscurité trompe son monde, il cache les faiblesses, il manipule une réalité emplit de haine et de faussetés. La nuit apaise t-elle les fanatiques ? Il n’en peut plus de voir ces mensonges, ces apparences. A travers une lucarne, comment peut-on se faire idée d’un monde qui part en éclats ? Peu importe les systèmes, peu importe les arguments, peut-on convaincre dans le dernier souffle d’un enfant innocent que le feu qui le brûle est justifiable ?
Il déguste d’un sourire cynique son martini. « Une olive lui demande t-elle ? » Il acquiesce. Son corset révèle la bonté de la nature, Il admire. Il en ferait bien sa proie, son met du soir. Il a soudainement envie de chaleur, de moiteur et de corps transcendés. Il sent monter le flux sanguin raidir ses pulsions. Ce soir il sera provocant. « Vous êtes Madame ? » - « Votre muse » lui répond-elle. Elle ajoute : « Qui êtes vous ? » Il rit. « Qui puis-je bien être ? Un homme qui aime les olives, sucer ce fruit au creux de ma langue et sentir l’alcool imbibé sa nature. »
« Faîtes moi traverser les turbulences de ce monde pendant quelques heures, voulez-vous ? » Il plisse les yeux avec intérêt. « Le plus dur est fait, Madame. Nous savons que nous passerons ces ténèbres à dessiner de nos sentiments les plus désastreux contours de cette planète. Désirez-vous ressentir la rage ? Elle vit en moi telle une louve possessive de ses rejetons. Désirez-vous l’ardeur ? Je peux besogner tel un nouveau né dégustant son premier mamelon. Désirez-vous la tristesse ? Je la ressens plus que quiconque pour vous la faire partager. » Elle rit à gorge déployé. Son maquillage lui coulait déjà sur les joues. La musique s’était adoucie pour laisser vivoter un faible violon. Vulgaire. Elle ressemblait à toutes celles qui s’étaient jouer de lui. Même mensonges, même promesses. Et vice-versa. Le vice qui se versa avec une bonté sarcastique.
« Vous me faîtes penser à Georges politiquement. » Il rugit. « Georges ! Georges est un sale fasciste de merde ! Un sale fasciste de merde ! »
Elle devint impassible. « Certes. »
Elle reprit. « Puis-je vous enquérir de votre prénom ? »
« Oui. »
« Puis-je vous enquérir de vos passions ? »
« Au firmament de cette entrevue très chère. »
« Puis-je vous demander ce qui vous rend furieux ? »
« Vous voilà enfin intelligente. Je ne m’y attendais plus, j’en venais pratiquement à souhaiter vous remplacer par une bouteille. Je ne me convaincs de rien, je crache sur votre hypocrisie, votre opportunisme. Je vomis celle qui a détruit mes rêves. » Il s’interrompit. « Un whisky ? »
« Juste un doigt. »
« Vous me semblez bien étroite. Vous ne souhaitez pas un whisky d’abord ? »
« On y reviendra Monsieur. »
« Et si nous allions refaire le monde ? Brûler ces fanatiques, brûler ce racisme, brûler ces briseurs d’enfants, nous pourrions partir loin, très loin. A la frontière du sommeil et de la mort, là où tout est futile, là où tout est à refaire, à recommencer. Détruisons nos châteaux, détruisons ces systèmes, ces carcans de règles et d’architectures archaïques, détruisons nos replis consuméristes pour n’être plus que face à nous même. Souffrez-vous, Madame ? »
« Atrocement. Je vous suis. Partons. »
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Vous n’avez pas compris ? C’est normal. Je cultive l’élitisme.
Vous voulez comprendre ? Dans ma grande et généreuse bonté je vais étayer ce qui pour le commun des mortels n’apparaît pas comme évident.
Il se prénomme Ben, cultive le second voir le troisième degré mais à mesure que son propos avance, s’y reflète des vérités, des frustrations, des angoisses ou des envies. Adepte du masochisme intellectuel, Il ne peut supporter la profonde décadence d’un monde qui obscurcit son avenir. ‘L’homme est un loup pour l’homme’, sa destruction n’en est qu’inéluctable. Et pourtant un mince espoir le poursuit, qu’un jour la raison envahisse la face d’une planète souffreteuse.
Parfois désaxé, souvent passionné, Il vit d’envies. Il rêve d’un décor paisible d’espace, de neige, de froid. Scandinavie, Argentine, Il envie. En attendant, il use et abuse du seul système actuel, celui qui l’oblige à exister mais qui lui permet d’être utile, d’agir ou d’essayer. Il boit du martini, se complait dans son lit et attise les désirs vertueux de la luxure. Mais pourtant Il s’assagit dans la création de quelques lignes pour se vider l’esprit.
Faille ? Vide incoercible ? Face B d’un vieux 38 rare et élitiste.
Les plaies n’en sont pas plus refermées qu’il n’apparaît dans [son] regard. Une fougue qui masque trop bien ce qui se vit. Lorsque le bruit s’arrête, lorsque l’âme se retrouve avec son propre silence, [Il] devient apathique. Attiser les émotions, sentir l’existence, percevoir le fluide qui gémit en [Lui]. Et ? Rien. Il ne l'attend plus. Il vit !
Le débat est clos…pour le moment.